La loi n° 24-04 du 16 Chaâbane 1445 correspondant au 26 février 2024 portant ‘règles de prévention, d’intervention et de réduction des risques de catastrophes dans le cadre du développement durable’ constitue une avancée significative dans le domaine de la prévention et de la gestion des risques majeurs. Ce cadre juridique vise actuellement à renforcer les capacités nationales en matière de résilience face aux catastrophes d’origines naturelles et anthropiques, en adoptant une approche intégrée et proactive.
La loi n° 24-04 met l’accent sur plusieurs priorités stratégiques :
- Prévention des risques: Elle introduit des mesures visant à identifier, évaluer et réduire les vulnérabilités à travers des politiques adaptées d’aménagement du territoire et des plans de développement durable.
- Renforcement de la gestion des crises: Le texte législatif clarifie les rôles et responsabilités des institutions concernées dans la gestion des situations d’urgence et la coordination des interventions.
- Sensibilisation et éducation: La loi promeut une culture de prévention auprès des citoyens et des acteurs locaux, en insistant sur la formation et l’information comme outils clés.
- Intégration du changement climatique: Elle reconnaît les impacts du changement climatique sur l’intensification des catastrophes et propose des mesures spécifiques pour en atténuer les effets.
Cette loi a introduit de nouveaux risques et prévoit des textes d’application. Ainsi, constituent des risques de catastrophes au sens de cette loi 24-04 les 18 risques suivants :
- les risques sismiques ;
- les risques géologiques ;
- les risques d’inondations ;
- les risques climatiques extrêmes ;
- les risques d’incendies de forêt ;
- les risques industriels et énergétiques ;
- les risques spatiaux ;
- les risques radiologiques et nucléaires ;
- les risques affectant la santé humaine ;
- les risques affectant la santé animale et végétale ;
- les risques de pollution atmosphérique, marine et hydrique ;
- les risques des regroupements humains importants ;
- les risques de désertification ;
- les risques de sécheresse ;
- les risques d’érosion du littoral et d’élévation du niveau de la mer ;
- les risques cybernétiques ;
- les risques acridiens ;
- les risques biotechnologiques.
Les textes d’application publiés sont :
- Décret exécutif n° 25-60 du 28 Rajab 1446 correspondant au 28 janvier 2025 fixant les modalités d’élaboration et d’exécution des plans de confortement priorisés visant à préserver les infrastructures et les bâtiments à valeur stratégique ou patrimoniale contre les risques de catastrophes
- Décret exécutif n° 25-61 du 28 Rajab 1446 correspondant au 28 janvier 2025 fixant les missions, la composition et le fonctionnement du comité intersectoriel chargé de l’évaluation des dégâts occasionnés par la catastrophe
- Décret exécutif n° 25-62 du 28 Rajab 1446 correspondant au 28 janvier 2025 fixant les modalités d’élaboration du plan spécifique de gestion des décombres, résidus et autres déchets engendrés par la catastrophe
- Décret exécutif n° 25-63 du 28 Rajab 1446 correspondant au 28 janvier 2025 fixant les conditions et les modalités d’élaboration, de mise en œuvre et de gestion des plans d’intervention en matière de risques de catastrophes
Le Risque Sismique
L’Algérie est un pays sujet à une forte activité sismique, en témoignent les nombreux séismes survenus à ce jour à travers plusieurs régions du pays. Depuis le premier séisme connu survenu à Alger en l’an 1365, de nombreux autres séismes de différentes intensités sont produits et se sont succédés jusqu’à aujourd’hui. On peut citer entre autres Alger en 1716, Oran en 1796, Blida en 1825, Orléans ville (Chlef) en 1954 et 1980, et Boumerdès en 2003.
En effet, le Nord de l’Algérie est soumis à des séismes récurrents, le plus souvent d’intensité faible à modérée, mais pouvant être quelques fois violents. Les séismes survenus dans le pays sont superficiels et se manifestent à une profondeur atteignant au plus 15 km. Dans cette région du Nord du pays, il est relevé que l’activité sismique est permanente et il est enregistré mensuellement une cinquantaine de micro secousses en moyenne. Chaque trimestre, se produit un séisme dépassant 4.0 de magnitude.
La nouvelle réglementation parasismique algérienne promulguée en 2024 (RPA de 2024) établit un nouveau zonage pour le territoire national. Ce dernier est divisé en sept (07) zones de sismicité croissante, définies sur la carte des zones de sismicité a (07 zones), figure 1, à savoir :
Une nouvelle répartition spatiale de l’aléa sismique en Algérie a été établie dans le nouveau RPA. Il a été spécifié six zones sismiques afin d’atténuer la transition entre zones et se préparer pour un zonage sismique GRID (USA, Italie, etc.). Toute la bande nord d’Algérie (étendue à l’est et étroite à l’ouest) occupe les zones sismiques IV, V, et VI (PGA≥ 0,20g)
Par ailleurs, la carte sismotectonique du Nord du Maghreb (figure 2 ci-dessous) indique la continuité des failles sismiques dans la région.
Le Risque d’Inondations
Ce risque survient lorsque les zones sujettes aux inondations deviennent urbanisées, industrialisées ou agricoles. Les évènements météorologiques extrêmes sont, dans la majorité des cas, des déclencheurs de ces inondations. La vulnérabilité des populations exposées dépend de nombreux facteurs : degré d’exposition des bâtiments et des emplacements stratégiques, complexité et interdépendance des réseaux, diversité des acteurs publics en charge des services, etc. Ces facteurs affectent la capacité à rétablir rapidement un fonctionnement satisfaisant après un événement perturbateur.
L’Algérie face aux changements climatiques et une urbanisation rapide va connaitre une croissance importante des inondations catalysées par les évènements climatiques extrêmes.
D’après la carte des risques d’inondations, figure 3, il est constaté que la zone Nord de l’Algérie reste la plus exposée, à l’exception de la wilaya d’Adrar caractérisée par un risque modéré.
Le Risque d’Incendies de Forêt
L’Algérie couvre une superficie de 2,382 millions de km2, ce qui lui confère, en étendue, la place de premier pays africain, par ailleurs, sa superficie forestière qui avoisine les 4,1 millions d’hectares, demeure l’une des plus faibles du continent africain. Le Sahara l’un des plus vastes déserts du monde en occupe plus de 2 millions de km2 soit 84 % du territoire national. Comme le démontre la carte de répartition des forêts (figure 4), près de 42 % des espaces forestiers sont occupés par les maquis, que l’on peut définir comme étant toute végétation ligneuse ne dépassant pas les 07 mètres de hauteur. La prédominance des maquis témoigne de l’état de dégradation des forêts algériennes.
Dans la région méditerranéenne, l’Algérie se distingue comme l’un des pays confrontés à un grave problème de feux de forêt. Malgré des superficies brûlées qui peuvent sembler modestes en termes absolus par rapport à d’autres pays méditerranéens, la rareté des zones boisées et les risques de désertification amplifient considérablement leur impact dévastateur. Avec seulement 4,1M d’hectares, répartis sur 40 Wilayas, de forêts couvrant environ 1,76 % du territoire, l’Algérie est particulièrement vulnérable la répétition fréquente des incendies dévastateurs, survenant à moins de 10 ans d’intervalle, aggrave encore davantage les conséquences écologiques de cette situation.
Les incendies de forêts représentent une menace naturelle substantielle entraînant des dommages significatifs pour les écosystèmes forestiers, la faune, les populations et les infrastructures.
Les statistiques récentes non seulement au niveau national mais également planétaires indiquent une augmentation du risque d’incendies de forêt, influencé par divers facteurs tels que les conditions météorologiques extrêmes (canicules, températures extrêmes, humidité, vents violents), la disponibilité de combustibles inflammables (feuilles mortes, branches sèches, arbres tombés), les activités humaines (feux de camp, cigarettes, feux d’artifice), la topographie (pentes, vallées), et les pratiques de gestion des terres (coupe à blanc, mauvaise gestion forestière). Pour atténuer ce risque, des mesures proactives sont nécessaires, notamment la gestion des combustibles, l’utilisation de terres résistantes au feu, l’implémentation de systèmes d’alerte précoce, l’assurance de ressources adéquates de lutte contre les incendies, et l’éducation du public.
Le Risque Climatique -Pertes et Préjudices
Le changement climatique progresse rapidement et les risques liés au climat sont exacerbés. Le risque climatique dépend de l’aléa, de l’exposition des biens et des personnes, et de leur vulnérabilité face à cet aléa transfrontalier. Au-delà des incidences sur la production économique, les individus et les populations sont également vulnérables à des pertes et des préjudices immatériels ou non économiques. Ainsi, le discours sur les pertes et Préjudices (en anglais Loss and Damage L&D), a été initié durant ces dernières décennies par certains États insulaires préoccupés par les impacts liés au changement climatique qui peuvent être irréversibles et au-delà des limites d’adaptation physique et sociale. Il s’est institutionnalisé dans la politique climatique internationale grâce au mécanisme de Varsovie sur les Pertes et Préjudices adopté en 2013 et a été fermement pris en compte dans l’Accord de Paris en 2015.
L’Algérie a élaboré un Plan Climat dans le cadre de ses engagements pour lutter contre le changement climatique et pour promouvoir un développement durable. Ce plan est aligné avec les objectifs de l’Accord de Paris et les Objectifs de Développement Durable (ODD). Voici un aperçu des principaux aspects du plan climat de l’Algérie.
Le Plan Climat de l’Algérie, conçu pour lutter contre le changement climatique tout en soutenant un développement durable, fixe des objectifs ambitieux en cohérence avec l’Accord de Paris et les Objectifs de Développement Durable (ODD). Parmi les actions principales, le plan prévoit la réduction des émissions de gaz à effet de serre à travers la promotion de l’efficacité énergétique et l’adoption de technologies propres. Il encourage également la transition vers les énergies renouvelables, notamment par l’investissement dans l’énergie solaire et éolienne.
Le plan comprend des initiatives pour améliorer la gestion des ressources en eau et la conservation des écosystèmes, particulièrement dans les zones vulnérables comme les régions arides. Il prévoit aussi le renforcement des infrastructures pour résister aux impacts climatiques, telles que les inondations et les sécheresses. En outre, des programmes de reboisement et de lutte contre la désertification sont mis en place pour préserver les sols et promouvoir la biodiversité.
Enfin, l’Algérie s’engage à sensibiliser la population et à promouvoir l’éducation environnementale, tout en renforçant la coopération internationale pour une réponse collective au changement climatique.
